If you must fight...-Nash

Whedon Hollow est vraiment un lieu plein de surprises, j’avoue ne pas être déçue du déplacement. Une tonne de bouquins jonchent sur la petite table grasse du bar. Terrée au fond de la salle, je me plonge dans l’histoire de cette ville. Les sorcières y ont foutu un sacré bordel, bordel certes, franchement mérité. En général, la généalogie des sorcières se rejoint généralement à une des grandes sorcières assassinée dans un des procès. Pourquoi? Chais pas. Ma famille descend de Salem, mes aïeuls se sont exilés en France après le carnage puis se sont enracinés en Angleterre. Ils ont pas étés cons, ils ont fuit là où ça commençait à puer. Mais quand sentant-on que ça commence à puer? Quels sont les signes? Je me plonge un peu plus dans ma lecture. Cette ville possède toutes les réponses à mes questions. A moi de les trouver. Je dois agir vite et bien avant de me faire remarquer et canarder. J’ai pas fais tout ce chemin pour me prendre une balle, ça c’est sûr. Mon verre est vide, y’a la queue au bar. Fais chier. Je remballe mes bouquins dans ma besace, ramène mon verre au bar et sort. Rien de tel qu’un p’tit joint pour détendre tout ça. Je sors mon paquet de garrot de ma poche de jean et en tir un pré-roulé que je craque sans attendre. Dans les années 2000, c’était facile de fumer, relativement peu cher à se procurer et on en faisait pas tout un plat. Maintenant je roule sur l’or, en une soirée je me fais tout un mois. Maintenant tout le monde en est blasé et tout le monde en veut. Alors bon.

Je fume dans le froid, il fait si froid que j’ai l’impression d’être un dragon en crachant ma fumée. Une nana sort du bar, à moitié à poil pour ce temps là. Elle est mignonne, et à l’air pas mal arraché aussi. J’ai trouvé où j’allais dormir ce soir! Je me rapproche gentiment de la demoiselle, on échange des futilitées de nanas raides. J’aime bien ses yeux de chien battu. Je la fais tirer sur le joint, fume demoiselle, fume. Je passe ma main dans ses cheveux en riant, elle me propose un dernier verre chez elle au chaud car elle à froid. J’accepte, lui met ma veste sur le dos et on se met en route. Elle marche devant moi et non à côté, en sautillant comme une enfant par moment. Elle est fine et fluette j’aime ça. On arrive chez elle, et oh malheur. Elle a un chat. Je sais que les chats noirs blablabla NON MOI J’AIME PAS LES CHATS. Ca fait des boules de poils, ça larve partout, ça miaule comme un ouf quand tu le nourris pas. Et j’ai Rocket sur moi qui dort dans mon sac à dos. En espérant qu’ils s’entendent bien, sinon c’est mademoiselle qui va pas être contente. Je lui ai pas demandé son nom d’ailleurs, ou alors je l’ai oublié. T’façon je m’en fous un peu de son nom à l’heure actuelle. On enchaîne, l’alcool monte et la chaleur également. Elle est pas farouche, je me permet de l’embrasser. Sa peau est sucrée, est elle vibre sous mes doigts. On commence à se lover sur le canapé, pour finir dans son lit. Elle s’endort après l’amour, je me laisse bercer par Morphée une clope après.

Ouais, ‘fin morphée s’est vite fait la malle. “Salut!” J’émèrge durement. Rocket joue contre moi. La nuit pour lui s’est relativement bien passée puisque j’ai quitté le lit pour attérir sur le sofa. Et il à l’air de s’être fait un nouveau pote lui aussi. Je le prend dans mes bras, et me met en position assise. “Tu veux du café?” le st graal. Je hoche la tête en guise de réponse prend dans mon sac le nécessaire pour me faire émerger. Je sors de mon paquet de clopes le dernier pré-roulé et me met à la fenêtre de son Salon. “Au fait, merci pour la nuit sur le canap! Tu ronfles comme une vieille chevrolet par moment.” Je fume comme un pompier, si bien que c’était une affaire de cinq minutes. Un peu blasée, je retourne sur le canapé et m’apperçois que le petit raton l’a quitté. “Et euh t’affoles pas si tu vois un raton quelque part, c’est le mien.”

”Merci pour le kawa.” Sans plus attendre je plonge mon nez dans la tasse brûlante qu’on venait de me tendre. J’avoue que le café ne me fait plus grand chose, mais quand il est bon ça vaut le détour. Celui-ci était pas dégueulasse contrairement à ce que je m’attendais. Vous avez un bon point mad’moiselle. Je repose la tasse sans trop attendre et relève les yeux. Elle à un charme, cette fille. Je souris bêtement un quart de seconde. Y’a un truc avec ses yeux, un truc qui claque. “T’en fais pas pour Rocket, il est domestiqué depuis bébé. Il va pas détruire ton appart Princesse.” J’me souviens de sa tronche détrempée quand je l’ai trouvé. C’était un petit truc tout chétif et tremblant. Il était là avec ses petits couinements trop mignon. Alors j’me suis dis fais chier j’suis trop bête et je l’ai tiré de ce mauvais pas. Et mesdames messieurs, un raton laveur c’est loin d’être con! C’est un peu kleptomane par moments mais bon vaut mieux ça qu’un iench qui détruit vôtre super canapé en cuir quoi. Au début, j’pensais pas le garder. J’suis pas stable, je voyage tout le temps mais ça a semblé lui plaire. Et j’me suis attachée à lui. “Et apparemment ton Hercule s’entend très bien avec Rocket. Alors détend toi poulette tu vas chopper une ride.” Je suis pas si détestable généralement avec les lambdas. Mais bon j’arrive pas à me souvenir de son nom c’est grave?

Elle a l’air plutôt fraiche pour quelqu’un qui a la gueule de bois. Perso j’ai pas encore jeté un coup d’oeil à un miroir. Et j’suis encore à moitié à poil. J’ai jamais vraiment été pudique, au final de la peau c’est de le peau. J’bouffe de la merde et je me drogue mais j’ai quand même un super corps. Je remercie mes gênes pour ça et mes tatoueurs qui m’ont tous fais de magnifiques pièces. J’me lève pour chercher ma chemise des yeux, faut dire qu’elle sait faire voler les fringues puisque je la retrouve sur un abat-jour non loin. J’espère qu’elle me laissera au moins squatter sa salle de bain avant de sortir. Je sais même pas quelle heure il est, y’a pas de pendule ou d’horloge ici. Je prend mes deux sacs et retourne m'asseoir. Je sors du sac de Rocket un peu de sa bouffe et siffle pour l’appeler. Parce que oui, monsieur à son sac à lui. Il rapplique illico en sautant un peu partout dont sur les genoux de notre hôte. Il se pose deux secondes sur elle, la jauge et se rappelle que la nourriture n’attend pas. Je me rabat sur mon second sac à la recherche de mon portable. 10h. Depuis combien de temps n’avais-je pas autant dormi?

Puis je la regarde, et je culpabilise. J’aime penser que je ne suis pas une conne avec les gens qui ne le méritent pas.“Merci pour cette nuit. Désolée si j’te paraîs super farouche et mal léchée sans mauvais jeux de mots. Je m’appelle Nash. J’suis nouvelle ici, j’suis de Londres à la base.” J’lui souris toutes quenottes dehors en lui tendant la main. J’débarque ici, et je cherche des informations. Les chasseurs que je recherche doivent déjà se douter que je suis en ville. Elle vit ici, elle doit savoir des choses que je ne sais pas alors ça peut être intéressant de se faire une amie. Et faut avouer qu’elle est douée de son corps.

Awkwaaaaaard. Littéralement. Je sais pas j’ai pas le nom d’un dictateur fou à ce que je sache. Un hoquet m’échappe. Ca commençait à aller mieux, tout ça tout ça, et là voilà qu’elle devient carrément zarbi à la limite de la syncope. J’me considère pas comme quelqu’un de très poli et d’ailleurs si ma mère me voyait elle se retournerait dans sa tombe. MAIS LA ! J’me présente toute gentille souriante, je m’excuse d’être un ours mal léché et là mademoiselle s’écarte comme si j’avais la lèpre. Je m’apprêtais à me lever comme une sauvage pour lui demander c’était quoi son problème jusqu’à ce qu’elle prononce mon nom. Un frisson me parcouru. Je me souviens d’une gosse détrempée déambulant dans Londres. Une gamine, vu qu’elle était plus jeune que moi. Elle était toute mince, sapée d’une manière aussi provoquante que la mienne. J’lui ai proposé une clope. (parce que oui tout les gosses fument à treize piges hein). J’me souviens qu’elle a toussé avec une taffe et qu’elle allait chopper la crève sous cette pluie. J’lui ai mis mon manteau sur le dos comme je l’ai fait hier soir, et je l’ai emmené au Squat. J’étais pas du genre à sauver la première gosse en fugue, mais elle avait ce regard de chien battu… Les gars l’aimaient bien, Bee lui a appris à roulé en quelques heures. Elle souriait, et j’aimais ça. Puis elle est partie sans prévenir. J’lui en voulais pas parce qu’elle était partie, la vie dans notre squat c’était pas ce qu’il y avait de mieux. Je lui en voulais parce qu’elle n’a pas pris la peine de dire au revoir alors que j’ai tout fait pour elle.

Elle était au téléphone. J’avoue avoir bug un moment, genre error 404 not found. Une bonne minute c’était passée alors que je fouillais ma mémoire à la recherche de son prénom. Je sais que je l’appellais la gosse. Combien d’années s’étaient écoulées depuis nôtre rencontre? Mes parents étaient encore vivants à l’époque. Je devais avoir quoi, quinze ans? Etait-ce seulement possible que ce soit-elle? De combien de pourcentage cette nouvelle rencontre dépendait? C’était presque impossible. Puis la demoiselle commença à tourner chèvre encore une fois. Comment ça j’peux pas rester ici? Les choses risquent de s’envenimer? Quoi sa bande de potes avec qui elle était hier soir vont me tomber dessus et me faire passer un mauvais quart d’heure? C’est quoi encore ce délire. Si elle est originaire d’ici, ça m’étonne pas qu’elle soit frappée. Je passe une main dans mes cheveux. Je sais pas quoi dire ni quoi faire. J’me roule un joint cette fois-ci. Elle s’est allumée une clope. Petite joueuse. Cependant la marque me fait tiquer. C’est la marque de clopes que le petit oiseau fumait.

Mon cerveau bouillonne, comment ai-je pu être aussi bête de me l’envoyer? Une énorme pointe de culpabilité se fait sentir. J’pense à toutes ces sales choses que j’ai vécues après qu’elle soit partie. J’pense à quel point j’ai changer, à quel point je me suis endurcie. Et la voilà qui me fait perdre tout mes moyens. Je met un temps record à roulé, j’ai besoin de fumer maintenant. J’me lève et tourne en rond dans l’appart mon pétard au bec. Il s’enflamme seul. Etre la fille du feu à ses avantages. J’ai l’impression de commencer à brûler. J’ai horreur de me faire déstabiliser et là une nana me recalque 13ans de souvenirs dans la gueule. Elle me demande si je ne l’ai pas reconnue. Je sais que ma mémoire n’est plus aussi fraîche, mais je tenais à cette fille. Et pendant un temps elle à fait partie de ma famille. Les flashbacks se poussent. J’ai du mal à retourner fouiller dans mon passé. Du moins tout ce qu’il y a avant le décès prématuré de mes parents. C’était comme si nous étions deux personnes différentes. Elise, la gosse pas sociable qui en faisait baver à ses parents et Nash la dure qui passait sa vie dans des squats à buter du chasseur. Mes cent pas se sont stoppés face à la fenêtre de son salon, là ou mon regard se permit de se perdre. Le cendrier que j’avais placé plus tôt était resté là, pas de soucis pour la cendre. “J’dois t’avouer que pendant treize ans j’ai pas pensé à toi. Mais j’oublie pas mes petits oiseaux, la gosse.”